ERC au quotidien ?

Date de l'article 23.09.2019 - 11:00
Auteur Jean Burger
En résumé La séquence ERC (Éviter, Réduire, Compenser) est une démarche qui s'applique à certaines actions des politiques publiques et de l'aménagement. Et si ces trois mots-clés pouvaient devenir une sorte de référence pratique pour tenter d'harmoniser nos actes quotidiens avec le grand concert de la sobriété écologique et de la bonne marche vers la transition écologique ?
L'article

Dans les grands registres de notre vie de tous les jours, est-ce que cette « grille » ERC, pourrait nous aider à faire de bons choix dans nos actes de la vie quotidienne ?

Quelques mises en situation à titre d'exemples :

Je dois me déplacer pour aller voir ma cousine à Strasbourg

1. Est-ce que je peux éviter d'y aller ? Dans ce cas un coup de téléphone ou un échange en visioconférence peut-il suffire ?
2. Il faut que j'y aille. Dans ce cas, le choix de la réduction est large : je peux éviter l'avion (un gouffre énergétique), la voiture (surtout si je suis seul dedans), la chaise à porteur (catastrophique sur le plan social), la péniche (un peu long...) et choisir le train.
3. Par contre, compenser n'est pas simple, il y a bien des associations qui vont vous proposer de verser votre obole pour replanter des arbres « puits de Carbone » mais est-ce vraiment une bonne option ?  Comme en matière d'aménagement, la compensation est la dernière solution qu'on voudrait éviter...

J'ai besoin d'un nouvel aspirateur

1. éviter : je le fais réparer. Il existe de plus en plus de centres de réparation ou des « repair cafés » et mon aspirateur trouvera une seconde vie ; ou passer le balai, moins efficace dans les coins, mais bien plus économe en matériaux investis et en énergie.
2. réduire : j'en achète un d'occasion ou je le mutualise avec mon voisin, qui comme moi ne s'en sert pas plus d'une fois par semaine.
3. compenser : là encore, la compensation n'est pas évidente...

J'ai envie de manger des crevettes

1. éviter : Savez-vous comment sont nourries les crevettes, surtout quand elles viennent d'élevages situés à l'autre bout du monde, bourrées de farines animales ? Non, laissez tomber ! Un meilleur choix serait de reporter votre recherche de protéines animales vers des vers de farines, nourris localement de farines de céréales bio qui sont bien moins consommatrices de CO2  et d'intrants et qui comportent moins de risques sanitaires.
2. réduire : si vous ne pouvez pas vous retenir, essayez des crevettes européennes, issues de pêche côtière, bien plus petites et sans doute meilleures.
3. compenser : aïe, là encore, il va falloir faire preuve d'imagination...


Je veux prendre un bain

1. éviter : je laisse le soin à votre entourage de juger, mais il faut être conscient qu'on est soumis à une forte pression concernant l'hygiène corporelle et que l'hygiénisme du 19e siècle a été relayé par des normes sociales, largement prescrites par le lobby des parfumeurs et des savonniers...
2. réduire : la douche permet de réduire ma consommation d’eau  (si la durée est raisonnable...)
3. compenser : alors là, c'est facile :vous récupérez l'eau dans votre bac de douche (20 litres au moins pour ce qui me concerne) et vous l’utilisez dans vos toilettes ou pour arroser vos pots de fleurs ou votre jardin.

Au vu de ces exemples, j'ai bien compris que nos choix individuels ne peuvent  être assimilés à des actions d’aménagements ou à des choix de politiques environnementales et donc que cette tentative d'élargir la séquence ERC à notre quotidien a effectivement ses limites. En remuant mes souvenirs, je me suis souvenu de la règle des 3R proposée lors du Jour de la Terre dans les années 70 (Réduire, Réutiliser, Recycler). Elle a évolué, dans les années 2000, en celle des 5 R (Refuser, Réduire, Réutiliser, Recycler, composter (Rot en anglais)). Comme les démarches autour de l'économie circulaire, elle interroge plus largement nos pratiques de vie quotidienne et de  consommation, en prenant en compte les cycles de vie des biens et des services dans leur ensemble :  processus de production, d'usage et de fin de vie du produit, émissions de CO2, approche sociale, impact sur l'environnement et la biodiversité...
Donc il me reste encore pas mal de boulot pour faire ma part de colibri, et essayer de faire preuve d'imagination, pour aller plus loin dans la recherche de cohérence entre ma vie quotidienne et la nature.


Pour aller plus loin :

Une vidéo de “Partager c’est sympa”, didactique et drôle à la fois, pour orienter nos choix de consommation, en particulier au moment des soldes



Jean Burger, J’ai fait partie de l’équipe des écolos des premières années, en tant qu’étudiant bénévole puis comme salarié. Depuis le virus de faire connaître et partager la nature avec les autres ne m’a plus quitté. Quand les sorties sur le terrain m’en laissent le temps, je suis aussi coprésident de cette belle association


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