Année 2005
Mois Janvier
Prénom Nom Manuel IBANEZ
Souvenir Ce que les écolos de l'Euzière m'ont apporté

2005 - Ce que les écolos de l'Euzière m'ont apporté

Témoignage

Arrivé aux Ecologistes de l’Euzière à la sortie de mes études, j’ai eu la chance de cheminer pendant quelques années au sein de cette association hors du commun. Au-delà d’une aventure humaine d’une très grande richesse pour moi, qui a d’ailleurs fait naître des amitiés profondes et durables, je réalise aujourd’hui avec quelques années de recul combien les Ecologistes de l’Euzière m’ont apporté, formé, nourri de milles trésors de connaissances, de pratiques et de façons de penser. La liste est longue mais je vais tenter de l’illustrer par quelques exemples.
Il y a tout d’abord tout ce que j’ai appris avec l’animation nature, le coeur vibrant de l’association. Quelle joie d’accompagner petits et grands, grâce à la pédagogie de projet, dans la découverte des espèces et des milieux d’abord par des approches sensibles et sensorielles puis en aiguisant peu à peu son regard et sa compréhension des mécanismes du vivant et leurs interrelations. Séjours à Fiougage, 24h nature, animations au Mas de l’Euzière, stand « plus belles histoires de nature » , et j’en passe, autant d’oeuvres pédagogiques d’une qualité rare et inestimable. Avec les Ecologistes de l’Euzière, la « vulgarisation » prend des lettres de noblesses pour devenir partage, transmission, graines d’envie de savoir et semences de nouvelles passions. J’ai réalisé la force de l’émerveillement comme moteur d’envie de comprendre, connaître, respecter et protéger.
Mais c’est sans oublier de bien ancrer ces savoirs-faire d’animation et de transmission avec des connaissances naturalistes solides et des approches scientifiques rigoureuses. Et c’est ce continuum parfaitement mené entre les savoirs universitaires, l’expertise naturaliste, professionnelle et amatrice, et la pédagogie (animation, formation, éditions) qui donne cette puissance et cette saveur à l’action des Ecologistes de l’Euzière.
J’ai également appris durant ces années à lire et comprendre les paysages et les territoires. Pinèdes sur des sols marneux de rebord, garrigues et taillis de chênes verts recouvrant les vastes plateaux à parcours de brebis, dépressions sédimentaires où serpentent les feuillages caduques des ripisylves, village regroupé autour de résurgences à la sortie de réseaux karstiques, troupeaux de chèvres accrochés aux pentes schisteuses où l’acidité laisse pousser des bruyères arborescentes sous les chataigniers, tourbières sur les vieux massifs granitiques où paissent des vaches à viande... L’oeil s’aiguise pour voir peu à peu sous les formes et les couleurs d’un paysage, une histoire géologique, un agencement particulier d’habitats naturels, une succession d’associations végétales mais aussi des pratiques humaines anciennes ou récentes. Cet art de décrypter le paysage reste profondément ancré où que l’on soit, où que l’on vive. J’ai toujours autant de plaisir à voir et comprendre pourquoi la lande est ici jaune d’ajoncs alors que là-bas elle est brune de fougères hivernales, où passe l’eau, en surface ou par suintement, pourquoi ce village est accroché au rocher alors que l’autre est à la croisée de chemins, où se situe la faille entre ce socle de granite et cette succession de roches métamorphiques... Cette passionnante curiosité je l’ai apprise à vos côtés.
Mais ç’a été aussi pour moi l’apprentissage de la vie associative, l’implication d’adhérents passionnés et passionnants, l’accompagnement de stagiaires et d’étudiants, le travail acharné de l’équipe salariée, le soutien sans faille d’administrateurs et de co-présidents au courage remarquable, la relation avec les partenaires et les réseaux. L’héritage de l’éducation populaire d’une part et de la lignée des naturalistes humanistes d’autre part ont sans nul doute contribué à me construire. Je le remarque aujourd’hui dans ma façon d’accompagner les territoires dans leurs transitions écologiques et citoyennes.
Les Ecologistes de l’Euzière c’est aussi cette pépinière effervescente. Combien de projets, d’idées novatrices, de réseaux et de nouvelles coopérations sont nés autour de la grande tablée des « mardis soirs » ? L’association a permis à d’innombrables étudiants, stagiaires, jeunes professionnels tout sortis des études, contrats aidés et même en son temps objecteurs de conscience, de développer leurs connaissances, leurs expertises, leurs talents avant de tracer leurs propres chemins dans diverses directions.
Pour tout cela, et bien d’autres encore que je n’ai pas eu le temps de cristalliser sur cette feuille de papier, je souhaite exprimer un immense MERCI à l’association des Ecologistes de l’Euzière et toutes ces belles personnes qui l’incarnent au fil des années.

Manuel Ibanez
stagiaire en 2005
salarié des Ecologistes de l’Euzière de 2006 à 2014
puis salarié du Collectif des Garrigues de 2014 à 2017